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Zelda, Princesse bibliophile

Le Prince Bâtard - Robin Hobb

25 Janvier 2021, 17:15pm

Publié par Zelda

The Wilful Princess and the Piebald Prince (Le Prince bâtard en français) est un court texte de Robin Hobb qui relate un épisode de l’histoire de la famille Farseer (traduit par Loinvoyant) dont on glane des bribes dans la série du Royaume des Anciens, au sujet d’un prince doté du Wit (le Vif en français), cette magie permettant de communiquer avec les animaux. Dans les romans, ce personnage est évoqué périodiquement, au travers de rumeurs et de croyances, souvent en lien avec les préjugés contre cette magie, et dépeint comme un souverain cruel dont le peuple a été sauvé par un de ses cousins. La haine envers les personnes possédant cette magie provient de cette époque sombre.

La novella dont je vous parle aujourd’hui raconte, elle, ce qui s’est réellement passé, parfois aux antipodes de ce qui est resté dans les annales. Loin du prince sanguinaire et injuste, on découvre le destin tragique d’un homme victime de la jalousie d’un cousin sûr de son bon droit d’hériter le trône à la place du bâtard, cousin qui va instrumentaliser une xénophobie naissante à l’égard des personnes dotées du Vif pour prendre le pouvoir.

 

De par son format, ce livre se démarque des romans entre lesquels il s’insère, car il en découle un rythme complètement différent. Alors que Hobb nous a habitués à prendre le temps de développer tranquillement ses personnages et leur environnement, ici tout va très vite.

De plus, l'œuvre se présente comme un témoignage d’une personne qui a vécu cet épisode, proche des protagonistes sans pour autant avoir vraiment une part très active dans le déroulement des événements. Le style est donc plus épuré, plus proche du langage oral.

Personnellement, ce livre m’a complètement bouleversée. Il met en lumière ce que l’être humain a de plus moche : sa capacité à estimer normal de causer du tort à autrui - et on parle là de torture, de lynchage et de meurtre - pour obtenir ce qu’il veut. Par là, on observe l’institutionnalisation de la discrimination : une population qui jusqu’ici était intégrée et ne suscitait pas de réflexions particulières devient l’objet d’une haine tenace et irrationnelle, qui s’appuie sur des fantasmes irréalistes pour justifier son existence. Le point culminant réside dans le dénouement qui m’a rappelé les scènes les plus terribles des pièces de Shakespeare ou Marlowe. Pour couronner le tout, on découvre à quel point la vérité a été travestie pour déguiser la malveillance en bravoure : ce sont les vainqueurs qui écrivent l’Histoire.

 

Avec ses airs de croisement entre conte et tragédie, vous l’aurez compris, le Prince bâtard se révèle être une fable sur la xénophobie assez déprimante, dont il m’a fallu un peu de temps pour me remettre.

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