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Zelda, Princesse bibliophile

W.E.

13 Mai 2012, 11:00am

Publié par Reika

W.E.

  Séquence ciné !

 

  Un jour, Madonna a décidé de faire un film. Et tout le monde s'est mis à craindre une ignoble bouse.

  Si ce n'est pas le film de l'année, j'ai tout de même été curieuse d'aller voir ce fameux W.E. , non pas parce qu'il a été réalisé par Madonna (qui aurait pu faire nettement pire, qu'on se le dise), mais parce que le sujet en lui-même m'intéressait.

 

  Le scénario se compose d'un chassé-croisé entre deux histoires : la vraie, celle de l'histoire d'amour entre Wallis Simpson et le roi Edouard VIII, et la fiction, celle d'une femme minée par un mariage malheureux, et qui porte le même prénom que l'américaine la plus détestée de toute l'histoire du Royaume-Uni. Le film se concentre sur les deux femmes et instaure un dialogue entre elles.

  La première a vécu une histoire d'amour incroyable, qui paraît trop belle pour être vraie, et pourtant, elle a réellement existé. Un roi a réellement abdiqué pour pouvoir épouser la femme qu'il aimait, avant de devoir s'exiler avec elle. Sur le papier, c'est très beau.

  Mais voilà, la deuxième, elle, a envie de connaître la véritable histoire derrière le conte de fée, et hante les enchères des objets du couple mythique chez Sotheby's, quand elle n'est pas occupée à se faire tromper ou battre par son psy de mari.

  Je n'ai pas osé regarder ce qu'en a dit la presse avant de vous écrire mon point de vue : je ne veux pas qu'il soit biaisé par des gens qui mourraient peut-être d'envie de pouvoir descendre le travail de Madonna, qui a visiblement beaucoup tenu à faire son film, et qui aimait sincèrement son sujet. On peut trouver des défauts au film, certes, mais on ne peut pas dire qu'on n'y voit pas l'amour que Madonna lui porte.

 

  Je me suis trouvée profondément inspirée par une chose qui est dite de manière très directe par la Wally de notre époque (est-elle la porte-parole de Madonna en cela ?) : elle veut pouvoir raconter l'histoire du point de vue de Wallis, de celle qui a été rejetée par tous et qui n'a jamais eu voix au chapitre. Elle veut redonner sa voix à celle à qui on n'a jamais donné la possibilité de s'exprimer.

  Moi qui réclamait dans mon dernier article que l'on fasse une place à l'avis des méchants, j'ai été servie. Wallis, pour les Anglais de l'époque, était un peu la Camilla des Anglais d'il y a quelques années. Et on a déversé des kilos d'encre et d'oxygène pour le récit de tout ce que le roi avait laissé tomber par amour pour elle : son trône, sa famille, et même son pays, puisqu'il avait été condamné à l'exil. Le film de Madonna proteste contre ce fait, et réclame qu'on se demande, cette fois-ci, ce à quoi Wallis, elle, avait dû renoncer pour être avec lui.

  Forcément, j'ai bondi sur mon siège. Effectivement, dès qu'on accuse quelqu'un d'avoir mal agi, on arrête de s'interroger sur ses sentiments. Et si l'on se demande ce qui l'a poussé à agir, on parle froidement en termes de mobile, comme si quelqu'un qui commet quelque chose de répréhensible l'a fait mécaniquement, parce qu'il est fondamentalement mauvais. Mais les personnages comme Sauron n'existent pas en si grand nombre dans la vie réelle. Non, dans la réalité, il y a tout un tas de gens qui ont parfois tort, qui font parfois du mal autour d'eux, qui sèment la souffrance sur leur chemin, et qui, pourtant, croyaient bien faire, et avaient eux aussi des sentiments humains.

 

  Ce qui rend cette revendication encore plus intéressante, cependant, est de comparer ce film au très récompensé Discours d'un roi.

W.E.

  Celui-là racontait une histoire très proche : celle du frère bègue du roi Edouard VIII, qui lui a succédé sur le trône pour devenir George VI, papounet de cette brave Elizabeth.

  Il y a un décalage assez frappant sur la manière dont les diverses personnalités sont présentées dans ces deux films. Colin Firth délivrait un homme complexé et sous-estimé par ses proches, à l'exception de sa femme. Son frère et Wallis étaient présentés comme des personnages vulgaires, futiles, nazis (mais ça, tout le monde en parle), et même parfois méchants.

  Dans le film de Madonna, c'est l'inverse. Tout d'un coup, la situation se renverse, et ce sont Wallis et son prince charmant qui sont mal traités, qui souffrent, et se heurtent à l'incompréhension et à l'étroitesse d'esprit de la famille royale. Si George VI n'est pas aussi franchement critiqué dans ce film que ne l'était Edouard VIII dans l'autre, il reste un personnage faible, effacé, influençable, qui se laisse dicter sa conduite par une horripilante épouse intraitable. Wallis et son homme sont accusés de nazisme alors qu'ils ne cherchaient qu'à éviter la guerre. Le film présente en tout cas l'adhésion au nazisme et l'amitié des deux personnages avec Hitler comme des rumeurs que peu de preuves peuvent étayer.

 

  Comme quoi, tout est vraiment une question de point de vue.

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